Pierre Pilonchery

«Promenade n°2 / Musique pour Cailloux et Torrent »

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«Promenade n°2 / Musique pour Cailloux et Torrent » est une suite de
percussions de cailloux frappés ajoutée au son du torrent tout à côté. Ces
tracés sonores s’additionnent par superpositions comme les tracés des
gravures sur les galets de La Colombière. accompagnés du son de l’eau qui
coule comme celle de l’Ain tout à côté.
Il y a l’acte de la nature, les cailloux et l’eau qui coule, et puis il y a l’acte
d’une décision humaine, cueillir les cailloux et les frapper l’un contre
l’autre pour produire des timbres et des hauteurs de sons différents selon
leurs tailles et leurs grosseurs. La musique des cailloux s’ajoute à celle de
l’eau.
C’est un manifeste d’une action humaine dans une action de la nature. Ses
outils sont naturels et humains, une forme de conversation superposant les
deux. C’est une composition revendicative de l’apport de l’homme à la
nature. L’homme ajoute à la nature, c’est là sa force créative.
Peut-être les hommes à l’abri de La Colombière ont-ils « joué du caillou »,
improvisant peut-être aussi à plusieurs un orchestre de fortune, peut-être
pas, mais j’aime le penser comme un clin d’oeil vers eux, là-bas, si loin
dans le temps et pourtant si proche en même temps. Nous vivons dans des
temps superposés, comme tous les temps depuis ceux de nos lointains
ancêtres auxquels nous rendons ici un affectueux hommage. Dans nos
gestes et nos sensations nous pouvons retrouver les leurs. Ce sentiment là
me fait du bien, il me rapproche affectueusement des autres, ceux d’avant
mais aussi ceux d’après.
Ce jeu entre la nature et l’homme est une situation entre les médias
artistiques et ceux de la vie, une forme d’expression multidimensionnelle.
La technologie d’aujourd’hui permet de l’agrandir en lui donnant toute sa
résonance, une addition d’instants dans le temps et le monde, additionnant
ainsi et réciproquement l’espace et le temps. Élever un geste simple,
frapper des cailloux les uns contre les autres, au rang de l’art, c’est une
expérimentation humaine c’est-à-dire la mise en forme d’une énergie
créatrice, et cette énergie là, elle est de tous les temps, elle n’a pas
d’époque, elle est universelle, sur tous les endroits de la Terre à toutes les
époques de l’histoire humaine.
Voilà les ingrédients, pas besoin de virtuosité, seulement des situations
développées par la mise en mouvement d’un geste élémentaire simple pour
créer une nouvelle situation, celle d’un espace-temps étiré au-delà de son
temps pour atteindre tous les temps, une forme de tissu sonore d’espacetemps.
En fin de compte faire de l’art c’est faire de la vie, à toute époque. « La
superposition de la vie, de la pensée et du temps » (Gaston Bachelard, dans
« La dialectique de la durée »), c’est une conscience temporelle.


Pierre Pilonchéry, 29 avril 2023

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